Placer la trésorerie de son entreprise de manière durable

Les entreprises qui pratiquent la RSE sont de plus en plus nombreuses et il faut s’en féliciter. Un dirigeant qui s’inscrit dans une démarche RSE est un dirigeant parfaitement conscient des risques de nature ESG et des externalités négatives liées à l’activité de son entreprise. Pour autant, il ne doit pas oublier que le cycle d’exploitation de son entreprise englobe aussi la trésorerie de celle-ci et sa gestion.

Par conséquent, pour faire en sorte que son entreprise suive une trajectoire vertueuse en termes de durabilité, il convient aussi de gérer sa trésorerie de manière responsable.

Certes le dirigeant ou le trésorier d’entreprise sera bien en peine d’évaluer l’impact carbone d’un compte à terme ouvert dans les livres de son établissement de crédit traditionnel. En tout cas, selon une étude Oxfam de 2020, l’empreinte carbone des grandes banques françaises représente près de 8 fois les émissions de gaz à effet de serre de la France entière. Raison de plus pour le chef d’entreprise soucieux de limiter l’impact négatif de l’activité de son entreprise sur le climat (ou d’autres facteurs de durabilité) de faire en sorte que sa trésorerie soit investie, dans des proportions qu’il lui appartiendra de définir avec son conseiller en gestion de patrimoine, dans des instruments financiers durables.   

Pour ce faire, il aura à disposition un grand nombre de produits financiers plus ou moins liquides, plus ou moins risqués qui lui permettront, en quelque sorte, de boucler la boucle de la stratégie RSE qu’il a mise en place au sein de son entreprise.

La gestion à court terme de la trésorerie

Des fonds monétaires labellisés ISR adaptés au placement de trésorerie à court terme

Pour la gestion de sa trésorerie à court terme, le chef d’entreprise pourra souscrire des parts de fonds monétaires labellisés ISR, greenfin ou bien « towards sustainability » (label belge) pour ne citer que ces trois labels.

L’offre de fonds monétaires qui contribuent à la réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES) s’étoffe progressivement. Généralement, ils intègrent des indicateurs climatiques dans l’analyse des émetteurs et des titres, et cherchent globalement à avoir une incidence positive à long terme sur les objectifs environnementaux et sociaux.

Ces fonds permettront de gérer les flux de trésorerie de l’entreprise à court terme avec des risques minimes. L’horizon d’investissement recommandé est très court, généralement de 3 mois.

Ces fonds monétaires labellisés qui ont un objectif d’investissement durable pourront venir en complément d’un compte à terme notamment.

La gestion à moyen ou long terme de la trésorerie

Des fonds durables ou éco-responsables plus ou moins risqués, pour gérer la trésorerie à moyen ou long terme.

S’agissant du placement de la trésorerie à moyen ou long terme, autrement dit de la trésorerie de nature excédentaire, le trésorier aura à sa disposition une grande diversité de fonds ESG plus ou moins vertueux.

Il pourra notamment trouver des fonds bénéficiant du label FAIR (ex finansol), et ainsi avoir l’assurance que la trésorerie investie sur ce type de fonds est affectée au financement d’entreprises solidaires qui font en sorte de faciliter l’accès à l’emploi pour des populations qui en sont éloignées ou encore qui mettent en place des projets citoyens dans la préservation de la biodiversité, les énergies renouvelables, la collecte et la réutilisation des déchets, etc.

Le trésorier pourra également privilégier des fonds qui tiennent compte des incidences négatives sur les facteurs de durabilité. En d’autres termes le ou les gérants de ces fonds (généralement classés article 9 selon le règlement européen SFDR) veillent à ce que leur décision d’investissement n’ait pas un impact négatif sur l’environnement, sur ce qui relève du social ou de la gouvernance. Cette prise en considération nécessite de se détourner des entreprises qui opèrent dans le secteur des combustibles fossiles par exemple, celles dont l’empreinte carbone est jugée trop importante ou dont l’activité génère des déchets dangereux.

Depuis juin 2023, les sociétés de gestion de portefeuille sont tenues d’établir un rapport sur les principaux indicateurs d’incidences négatives.

Les parts des fonds prenant en compte des critères ESG pourront être souscrites via un compte-titres ou un contrat de capitalisation, le cas échéant.

Des produits structurés qui intègrent des critères ESG

Les produits structurés sont des titres de créance (EMTN pour Euro Medium Term Note) émis par des établissements de crédit. Ils peuvent être plus ou moins complexes et plus ou moins risqués et d’une maturité généralement comprise entre 3 et 10 ans.

La société d’information financière Quantalys et le courtier en produits structurés Feefty ont lancé un label ESG pour les produits structurés, le label DSP (Durable Structured Product Label).

Selon ces intervenants : « le label DSP s’applique sur toute la chaîne de valeurs : depuis l’émetteur du produit jusqu’au reporting, en passant par le structureur, les sous-jacents du produit (fonds, indices ou titres), la valorisation, etc. Il permet d’évaluer le niveau de durabilité des produits structurés et de répondre au souci d’harmonisation des différentes initiatives individuelles en gestion structurée afin de bénéficier d’un standard de Place. »

Au-delà de la question du label, il est tout à fait possible de sélectionner un produit structuré dont le sous-jacent (indice ou panier d’actions) prend en compte des critères ESG. Un produit structuré sur-mesure peut aussi être conçu à partir d’un certain montant (au moins 200,000€) si bien que l’investisseur pourra définir un cahier des charges stricte en matière d’exigences ESG.

Des fonds de Private Equity (PE) à impact

Comme des fonds de PE traditionnels, les fonds à impact investissent au capital d’entreprises le plus souvent non cotées à différents stades de maturité (venture, growth equity, buyout).

Selon le GIIN (Global Impact Investing Network), l’investissement à impact consiste à investir avec « l’intention de générer un retour positif, ayant un impact social et environnemental mesurable (par exemple : limiter le réchauffement climatique, réduire les inégalités sociales, donner accès à l’éducation au plus grand nombre), tout en assurant un rendement financier ».

L’investissement à impact repose sur le triptyque suivant :

  • L’intentionnalité, qui correspond à la volonté de l’investisseur de générer un bénéfice social ou environnemental mesurable et ainsi de contribuer au développement durable ;
  • L’additionnalité, c’est-à-dire la contribution de l’investissement à l’impact. Cela doit se traduire par un véritable accompagnement des entreprises financées vers une trajectoire ambitieuse en matière de lutte contre le réchauffement climatique, les inégalités sociales, etc.   ;
  • La mesure de l’impact et son intégration dans le processus d’investissement

La mesure de l’impact et lorsqu’une rémunération de la performance existe, l’alignement des intérêts entre l’équipe d’investissement et les souscripteurs.

France Invest et le Forum pour l’Investissement Responsable ont publié un cahier commun réalisé par et pour les acteurs de l’impact investing en France : Investissement à impact : une définition exigeante pour le coté et le non coté.

Il faudra être attentif à la thèse d’investissement mise en avant par la société de gestion (contribution claire aux Objectifs de Développement Durable des Nations-Unies notamment, expression concrète de l’additonnalité) et aux indicateurs mis en place pour mesure l’impact de ses investissements que ce soit d’un point de vue qualitatif ou quantitatif.

Des titres vifs de sociétés vertueuses sur le plan ESG

La trésorerie d’une entreprise pourra également être investie dans des titres vifs autrement dit des actions ou des obligations d’entreprises cotées via un compte-titres (voire un contrat de capitalisation).

Le chef d’entreprise ou le trésorier sélectionnera des titres émis par des entreprises qui sont véritablement engagées dans une démarche vertueuse sur le plan social, environnemental et de la gouvernance. Il pourra se fier au rapport extra-financier publié sur le site web de l’entreprise (conformément à la directive NFRD remplacée prochainement par la directive CSRD).

Conclusion

Il existe diverses façons de placer la trésorerie de son entreprise de manière durable. Ce faisant, le chef d’entreprise ira au bout de sa démarche de responsabilité sociétale.

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