Assurance vie et époux communs en bien
Dans le domaine de la gestion de patrimoine, l’assurance vie reste un outil indispensable pour optimiser la transmission de son patrimoine, se constituer une épargne tout en bénéficiant d’un cadre fiscal avantageux. Mais qu’en est-il de la co-souscription d’une assurance vie ? Qui peut y avoir intérêt, et pourquoi cette option pourrait-elle être pertinente ?
Lorsque deux époux communs en biens souhaitent placer leurs liquidités sur un contrat d’assurance-vie, ils seront bien souvent orientés vers la souscription dite « croisée », c’est-à-dire la souscription simultanée de deux contrats. Dans ce cadre chaque conjoint souscrit un contrat en désignant l’autre bénéficiaire. Au premier décès, le survivant percevra donc l’épargne accumulée sur le contrat de son conjoint, tandis qu’il restera à la tête de son propre contrat, non dénoué. Mais une autre option s’offre aux époux : celle de la souscription conjointe.
Qu’est-ce qu’une co-souscription d’assurance vie ?
La souscription conjointe se réalise lorsque deux conjoints souscrivent ensemble un seul et même contrat d’assurance vie. L’article L. 132-1, alinéa 2, du Code des assurances permettant en effet à plusieurs personnes de contracter une assurance réciproque sur la tête de chacune d’elles par un seul et même acte.
Dans le cadre d’une souscription conjointe les époux peuvent décider que le contrat se dénouera au décès du premier d’entre eux ou bien au second décès. En cas de souscription conjointe avec dénouement au premier décès, le survivant percevra immédiatement le capital (ou la rente). En revanche, en cas de dénouement au second décès, le survivant deviendra de facto le seul souscripteur du contrat. Il pourra ainsi disposer des fonds en opérant des rachats sur le contrat, et cela sans que les héritiers du défunt puissent s’y opposer.
Il est à noter que certains assureurs n’autorisent la souscription conjointe qu’entre époux mariés sous le régime de la communauté universelle avec clause d’attribution intégrale.
A qui la co-souscription d’une assurance vie est-elle adaptée ?
Dans un premier temps, il convient sans doute de dire en quoi la souscription conjointe peut être parfois plus adaptée qu’une souscription croisée. En effet, en cas de souscription croisée, l’époux survivant désigné bénéficiaire aura généralement le souhait de replacer les liquidités perçues à l’occasion du dénouement de l’assurance vie de son conjoint prédécédé sur son propre contrat d’assurance vie. Or, s’il a plus de 70 ans à ce moment-là, ou bien si son propre contrat a moins de huit ans, le réinvestissement pourrait être fiscalement désavantageux. On rappellera que, conformément à l’article 757 B du CGI, les primes versées sur une assurance vie après 70 ans ne donne droit qu’à un abattement de 32 500€ réparti entre tous les bénéficiaires (au lieu d’un abattement de 152 700€ par bénéficiaire s’agissant des primes versées avant 70 ans) .
Dans le cadre d’une souscription conjointe – le contrat se poursuivant au premier décès – le survivant continuera de profiter des avantages fiscaux inhérent au contrat.
Quid de la gestion du contrat d’assurance vie souscrit conjointement ?
Les conjoints co-souscripteurs devront agir d’un commun accord lorsqu’il s’agira de prendre des actes de gestion sur le contrat. Ainsi en ira-t-il en matière de rachat, d’avance sur contrat ou de modification de la clause bénéficiaire par exemple. La souscription conjointe implique donc une co-gestion de la part des époux, autrement dit une parfaite entente entre eux pour gérer le contrat.
En cas de divorce, la valeur de rachat du contrat d’assurance vie co-souscrit sera intégrée à l’actif de la communauté. Il conviendra donc de tenir compte de la valeur du contrat au jour de la dissolution de la communauté dans les opérations de partage.
Stratégie successorale et co-souscription d’une assurance vie
L’assurance vie présente le mérite d’échapper aux droits de succession. Au décès de l’assuré, la valeur de rachat d’une assurance vie est assujettie à un prélèvement à concurrence de la part revenant à chaque bénéficiaire. Ce prélèvement s’élève à 20 % pour la fraction de la part taxable de chaque bénéficiaire inférieure ou égale à 700 000 €, et à 31,25 % pour la fraction de la part taxable de chaque bénéficiaire excédant cette limite. Par ailleurs les primes versées sur une assurance vie avant 70 ans bénéficient d’un abattement de 152 500€par bénéficiaire (pour une description détaillée de la fiscalité de l’assurance vie voir ici).
L’assurance vie est donc un moyen pertinent pour réduire le poids de la taxation d’une succession en venant diminuer le montant de l’actif successoral taxable.
A cet égard, la co-souscription va permettre de neutraliser l’augmentation de la masse propre du survivant résultant du dénouement du contrat à son profit lors du premier décès.
Co-souscription ou démembrement de clause bénéficiaire ?
Les avantages successoraux offerts par la co-souscription d’un contrat d’assurance vie doivent être appréhendés en regard d’autres stratégies et notamment celle consistant à démembrer la clause bénéficiaire du contrat. On pense notamment à la désignation des enfants en qualité de nus-propriétaires leur permettant de faire valoir sur la succession une créance de restitution (pour une description détaillée du démembrement en matière d’assurance vie, voir ici).
Chaque situation patrimoniale est différente et le recours à la co-souscription ou à une souscription croisée avec démembrement de la clause bénéficiaire devra être méthodiquement souspesé.
Dans l’une et l’autre situation, il conviendra de veiller à la bonne rédaction de la clause bénéficiaire. Car une clause bénéficiaire mal rédigée peut compromettre les objectifs patrimoniaux du contrat.
Conclusion
La co-souscription d’un contrat d’assurance vie est une alternative intéressante à la souscription croisée en ce qu’elle permet bien souvent de réduire la masse successorale taxable. Toutefois, elle n’est pas sans inconvénients et doit toujours être appréhendée à l’aune d’autres stratégies patrmoniales.