L’engagement Dutreil (https://facteur7.com/pacte-dutreil/) consiste en deux engagements successifs : d’une part, un engagement collectif (ou unilatéral) de conservation des parts ou actions de la société pendant au moins 2 ans et d’autre part, un engagement individuel, pris par le ou les héritiers, de conservation des parts ou actions transmises pendant au moins 4 ans.
Au total, le pacte Dutreil exige donc en principe une période d’indisponibilité des parts ou actions « dutreillées » de 6 ans.
Et, il y a schématiquement deux façons d’appréhender l’engagement Dutreil : soit de manière offensive, soit de manière défensive, selon que les associés décident respectivement de réaliser rapidement la transmission, autrement dit de l’anticiper, ou bien de laisser le temps filer.
On s’en doute, le pacte Dutreil réputé acquis et post-mortem relèvent d’une démarche défensive. Dans un contexte où la transmission n’a pas été anticipée, ou en tout cas insuffisamment, ces deux dispositifs peuvent permettre en quelque sorte de rattraper le temps perdu.
L’engagement Dutreil réputé acquis
Le Dutreil réputé acquis consiste à considérer comme acquis l’engagement collectif (ou unilatéral). Autrement dit, la période de conservation de deux ans des actions « dutreillées » est considérée comme déjà terminée.
Pour cela, le donateur (ou le défunt) doit avoir détenu depuis au moins deux ans (de manière directe ou indirecte – deux niveaux d’interposition au maximum), au moins 34% des droits de vote et 17% des droits financiers (ou respectivement 20% et 10% si l’on parle de société cotée) de la société et y avoir exercé une fonction de direction[1] son activité principale si la société n’est pas assujettie à l’impôt sur les sociétés.
Si ces conditions sont remplies, alors les donataires ou héritiers n’ont pas à poursuivre tout ou partie du délai de deux ans restant à courir. Car en effet, les conditions de direction et de détention sont réputées avoir été remplies pendant au moins déjà deux ans au jour de la transmission.
Ainsi, seul l’engagement individuel de conservation de 4 ans reste à respecter ainsi que l’exercice d’une fonction de direction par le ou les héritiers ou donataire(s). A cet égard, la Cour de cassation est venue préciser dans un arrêt du 24 janvier 2024 (Cass. com., 24 janv. 2024, n° 22-10.413) qu’il revient impérativement à l’un des héritiers, donataires ou légataires de remplir la condition de direction pendant les trois années suivant la transmission. Autrement dit, la fonction de direction ne peut être exercée par le donateur, sauf à remettre en cause l’exonération partielle des droits de mutation à titre gratuit.
L’engagement post-mortem
Lorsque les conditions ne sont pas remplies pour se placer sous l’empire du dispositif de l’engagement Dutreil réputé acquis, ce qui est par exemple le cas si, à la date de son décès, l’associé ne dirigeait la société que depuis 1 an, il sera néanmoins possible pour ses héritiers de bénéficier de l’exonération partielle des DMTG si ceux-ci s’engagent collectivement (ou unilatéralement en présence d’un seul héritier), dans les 6 mois qui suivent le décès, à conserver les actions du défunt pendant 2 ans et, individuellement, à les conserver pendant 4 ans. La fonction de direction (ou d’exercice de l’activité principale) devra alors être exercée à compter de la signature de l’engagement collectif ou unilatéral pendant toute la durée de cet engagement et pendant une durée de 3 ans à compter de la transmission à titre gratuit.
Il est assez fréquent que le décès de l’associé fasse naître une indivision entre les héritiers. Dans ce cas, l’engagement collectif post – mortem devra être souscrit par l’ensemble des co-indivisaires.
Conclusion
L’engagement Dutreil réputé acquis et post-mortem peuvent être des palliatifs au manque d’anticipation du dirigeant en matière de transmission de l’entreprise familiale. Ils font partie des derniers recours disponibles pour bénéficier d’une réduction de 75% des droits de mutation à titre gratuit. Toutefois, ils ne faut pas perdre de vue que rien ne remplace l’anticipation. Le Dutreil réputé acquis et post-mortem s’avèreront parfois inapplicables en pratique contrairement à un Dutreil classique résultant d’une démarche offensive.
[1] fonction de gérant, nommé conformément aux statuts d’une société à responsabilité limitée ou en commandite par actions, d’associé en nom d’une société de personnes ou de président, directeur général, président du conseil de surveillance ou membre du directoire d’une société par actions.